Pourquoi cette image et quelle est sa relation avec le « départ à la retraite » de notre amie Liliane?
Il sagit dune colonie de fous de Bassan installés en Nouvelle-Zélande face au grand large de lîle du Nord. Ces oiseaux ont pris leur temps et sans autre technique ni repère que leur instinct, ont parcouru des milliers de miles au-dessus des océans avant de se poser, puis de se reposer sur cette plateforme, toujours la même depuis des siècles. Eux-mêmes sont identiques à ce quils étaient il y a près de 40 millions dannées. Ils attendent le bon moment pour repartir
A cette échelle, la mécanique du temps que nous connaissons nest pas facile à appréhender. Pour nous aussi, le temps, celui des montres et des réveils, des agendas et des calendriers, semble ne jamais sarrêter. Mais il faut linterrompre avant quil nemporte celui de nos vies si nous navons pas la sagesse de faire escale un jour, une fois le travail accompli.
A lavant poste de lapplication des technologies de linformation aux sciences humaines, Liliane a très tôt pratiqué le « développement multimédia » non seulement dans le secteur quelle connaît le mieux mais aussi dans toutes les dimensions de notre métier : la formation des étudiants et des chercheurs, les séminaires, les conférences, les colloques, les publications, les coopérations avec dautres disciplines. Consciente que le monde numérique nétait pas « spontané » pour tous et quil bouleversait quantité de nos anciens schémas mentaux, elle a su privilégier la pédagogie du changement et nous a tous entrainés dans le mouvement.
En 2002, il y a une éternité, dans une petite salle de la Sorbonne, Liliane participait à la présentation de la refonte et de la dynamisation du site officiel de luniversité créé en 1999. Cest de la préhistoire : 3.000 fichiers, 70 millions de caractères (70Mo), 500 connexions par jour. Dès cette époque, le souci de Liliane était de fédérer lensemble des contributions de la communauté de Paris IV, une communauté diverse (UFR, services administratifs, écoles doctorales), éclatée sur plusieurs sites géographiques et répondant à des publics dispersés (étudiants de Paris IV, étudiants à létranger, lycéens, autres publics). En 2012, le site héberge 87.225 fichiers contenant 4,7 milliards de caractères (4,7 Go), et le nombre de connexions peut atteindre 14.000 par jour. Le nom de liens externes est devenu quasiment incalculable. Quant au parc de machines, il est passé en dix ans de 400 à 4170 dont 2.800 ordinateurs.
Si presque tous les objectifs quantitatifs de larchitecture numérique sont désormais atteints, prenons garde cependant à ce que, dans un cosmos virtuel encombré dune multitude dactivités, le temps ne se vide de son sens.
A Liliane maintenant de nous répondre : pourquoi le temps gagné est-il si rarement du temps libre !
Françoise Pichon-Mamère
Le 15 mars 2012